Avec Harry Pilcer









Jenny Golder

eau visage, yeux magnifiques, jambes de meneuse de revue, elle n'avait comme seule rivale Mistinguett dont elle était la cadette de plus de 19 ans, peut-être même 21. - Sa voix, pour ce qui nous en est resté (10 enregistrements), demeure un exemple de ce qui peut "passer par le disque" quand on a du talent : elle est enjouée, drôle, innocemment suggestive et, avec son amusant accent, rappelle une époque qui ne saurait être autre chose que "merveilleuse".

Ce qui l'a poussé à se suicider le 11 juillet 1928, "à l'âge de 34 ans (sic)" demeure un mystère.

Sa vie pré-parisienne est d'ailleurs, à elle seule, un mystère, un mystère que son biographe, Alan Black [*] a quelque peu éclairci non sans laisser plusieurs points d'interrogation.

On la sait née Rosie Sloman le 14 janvier 1894 (ou 1896) à Kyneton, Australie. Son père, né John Solomon, était directeur de théâtre, commissaire-priseur, magicien, propriétaire d'un petit commerce de tabac et bookmaker... Sa mère dont on ne sait rien serait né Annie Louis Golder. La famille aurait déménagé en Angleterre aux environs de 1897 pour s'installer d'abord à Brighton puis à Londres en 1899.

Elle a 20 ans lorsqu'elle paraît pour la première fois en demi-vedette sur la scène du Continental Music Hall de Londres en décembre 1914 peu de temps après son mariage avec un certain Joe Bowden, acrobate, danseur, cycliste, chanteur, les deux présentant un numéro sous le nom de Jenny and Joe elle, en remplacement d'une précédente Jennie dont on n'a jamais retrouvé la trace (parce qu'avant Jenny [Sloman], il y avait eu d'autres Jennie) sauf qu'auparavant, elle avait fait partie d'un groupe qui portait le nom de The ragtime Six aux membres interchangeables, certes, mais avec lequel elle avait été en tournée dans les années 1912-1913 et sans doute avant puisqu'elle a environ 14 ans sur ses première photos de scène...

De 1914 à 1919, particulièrement à partir de 1916, le couple disparaît. On les sait en Espagne, en Amérique (?), en Australie... et puis plus rien.

Lorsqu'elle réapparaît, en janvier-février 1919, elle est au restaurant-cabaret, le Savoy, à Bruxelles et porte le nom de Jenny Golder.

À Bruxelles, à ce moment-là, Jacques-Charles, pour le propriétaire de l'Alhambra qu'on est à restaurer - un certain Léon Voltera - cherche une danseuse "espiègle" et même "excentrique". On lui dit de se présenter au Savoy, entre deux et trois heures du matin car il y a là une certaine Jenny "avec les yeux de Max Linder et les dents de Mistinguett..." [**] - Il accourt et l'embauche sur le champ pour sa revue Bruxelles qui danse. - Connaît-elle le "Sheeme" (Shimmy) ? - Bien sûr. - On lui confie deux numéros. - Grand succès. - Jacques-Charles suggère alors à son patron de l'engager pour son Casino de Paris. - On y monte, justement, une revue qui mettra en vedette Mistinguett (sic) : Paris qui jazz... (octobre 1920)


Le reste suivit

Avec le sourire, en mars 1921 (avec Maurice Chevalier dont elle sera la partenaire à l' Olympia en août 1922). - Elle y crée son premier succès : "Oh la la ! Oui Oui !"

Ses yeux très expressifs, "très suggestifs" diraient d'autres, attirent le tout Paris :

La belle de Paris de Saint-Granier, en octobre 1921
Folies sur folie aux Folies Bergère, en février 1922
Oui ma poupée, de Saint-Granier encore une fois, en février 1923.

Tour de chant en avril 1924 à l'Alhambra. - Londres (Directly from the Folies Bergère...), Rome, Berlin...

Music-Hall des Champs-Élysées en juin 1925 puis en janvier 1926 après un séjour à l' Empire.


Puis c'est l'apothéose

Elle est en vedette avec Dranem et Harry Pilcer (voir à Gaby Deslys) dans une revue intitulée Palace aux femmes en 1926-1927 puis Palace aux nues en 1927-1928, deux immenses succès.


Suivie presque tout de suite de la fin...

Fatigue extrême. - Opération à un genou en janvier 1928. - Dépression. - Remontée... et suicide inexpliqué.

Sa dépouille fut inhumée au cimetière des Fauvelles à Courbevoie.

En 1982, 54 ans plus tard, une simple écriture dans les registres : "Reprise de concession".


Dix enregitsrements

Huit chez Odéon. - Mlle Jenny Golder, l'étoile anglo-française, fin 1926. - Accompagnement du Jazz Melody Six.

"Jenny", "Sweet Child", "Que m'importe la brise", "J'ai l'air comme ça", "J'ai un amoureux dans la salle", "Sevilla", "He Dœsn't Know What It's All about" et "Paris" (Paree).

Et deux reprises, accompagnement de piano, chez Pathé vers à peu près la même période.

"Jenny" et celui qui suit :

"J'ai un amoureux dans la salle"

Collection André Anciaux


[*] The Life of Jenny Golder - Londres 2000 - R.P.M. Reprographics Ltd.

[**] Jacques-Charles - De Gaby Deslys à Mistinguett - Paris, n.d., c. 1930)